Les deux tableaux de Gerhard Richter intitulés Mort par balle 1 et 2 [CR: 669/1-2] représente Andreas Baader mort, lequel avait été arrêté pour être le co-fondateur de l'organisation terroriste de la la Faction Armée Rouge (connu sous le nom de Bande à Baader) en juin 1972. Les images sont tirées de photographies prises par la police captant les circonstances de la découverte des suicides des terroristes dans la prison de Stuttgart-Stammheim le 18 Octobre 1977.
Andreas Baader, au sol, allongé en diagonale, s'étend sur toute la longueur de la toile au format horizontal de Mort par balle 1. Alors que son bras droit est tendu le long de son corps, le gauche, lui, est avachi sur le coté. Le cou de Baader semble écartelé, sa bouche légèrement ouverte. Le sang s'écoulant de la tête d'Andreas Baader souille le sol. L'arme et d'autres objets éparpillés autour de sa tête sont difficiles à distinguer sur le tableau réalisé par Richter. Le pantalon noir du terroriste est en opposition totale avec son visage pâle qui se détache du sol gris.
Alors que la première toile semble similaire à la photo d'origine en raison du fait qu'il s'agit d'un détail en particulier et que le flou est plutôt léger, la seconde, Mort par balle 2 [CR: 669-2], quant à elle, montre un flou prononcé qui donne à Baader une apparence éthérée. Les limites entre la figure et le fond sont floues. Le visage de Baader ne peut plus être identifié en l'absence d'informations complémentaires. L'angle de prise de vue semble avoir légèrement changé et, malgré un plus large agrandissement, aucunes informations supplémentaires ne peuvent être détectées.
Sur les deux versions du tableau, le bras avachi sur le côté est la seule indication de la mort de la personne représentée, illustrée par la perte de contrôle que quelqu'un aurait de ses propres membres.
La posture rappelle, par exemple, des représentations comme la Piéta ou la peinture d'histoire de Jacques-Louis David La mort de Marat. De telles références de l'histoire de l'Art soulignent le rôle de la mort dans ce cycle de peintures.
Gerhard Richter décrit son processus créatif pour cette série comme suit: « En vérité, je n'ai réalisé que celles qu'on «ne pouvait pas peindre». Les morts. Au début, je cherchais plutôt à raviver l'ensemble du problème, la réalité de cette époque. Donc, en abordant ce sujet, j'avais tendance à penser en grand, à un travail qui engloberait l'ensemble du contexte. Puis les choses ont évolué dans un autre sens, vers la mort, un sujet qui n'est pas icompatible avec la peinture, au contraire, puisque la mort et la souffrance ont toujours été le grand thème en Art ».1
Les tableaux de Gerhard Richter montrant les morts de la Bande à Baader ont causé de nombreuses critiques, au même titre que la publication de leurs photos dans le magazine allemand Stern en Octobre 1980. Cependant, les réactions diffèrent les unes des autres selon Richter: « Je dirais que la photo déclenche un sentiment d'horreur tandis que le tableau sur le même sujet, provoque plutôt la tristesse, ce qui se rapproche de mon objectif ».2 L'adaptation artistique qu'en a fait Gerhard Richter forme une distance par rapport aux évènements pour permettre à l'observateur de réfléchir à l'impact de la mort des terroristes avec une vision libérée de tout jugement sans prise de posititon.
1 Extrait d'un entretien avec Jan Thorn-Prikker concernant la série 18 Octobre 1977, 1989 dans Gerhard Richter: Textes, les presses du réel, Dijon, 2012, (traduit de l'allemand par Catherine Métais Bürhendt), p. 201-202.
2 Ibid., p. 204.
Notes préparées par l'équipe éditoriale.
The Museum of Modern Art (MoMA), New York, USA
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